Hollow Dream
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 Tabissa [Validée]

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Tabissa
Pierrot the Clown - hystérique, moua?!
Tabissa


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Date d'inscription : 12/10/2007

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MessageSujet: Tabissa [Validée]   Tabissa [Validée] EmptyVen 26 Oct - 23:59

Nom: Kaczmarek
Prénom: Tabissa
Surnom: /
Rang souhaité: /
Age du coma: 28 ans
Temps passé à Hollow Dream:
- en tant qu’humain : à peine un mois
- en tant qu’Ombre : tout le reste
Ancienne profession: serveuse
Loyaliste? Elle suivra l'opinion générale, ne s’opposera jamais ouvertement à une décision, mais elle se carapatera sans prévenir au moment où il faut agir.

Description morale

Le Mal, le Bien ? Qu’est ce que c’est quand on baigne dans la haine et la douleur depuis sa plus tendre enfance ? La souffrance fait partie de la vie, tout comme l’amour… On n’y coupe pas. On ne s’aide pas, on se trahit. On ne s’aime pas, on se hait. On ne se caresse pas, on se frappe. On ne ressent pas de plaisir, on ressent de la douleur. Faire l’amour, c’est quoi ? Moi je connais juste le viol… Des amis ? Dois-je inventer leur confiance ? S’ils me veulent vraiment, il va falloir user de ruse. Et s’ils m’ont, ils devront subir ma présence jusqu’à ce qu’ils rendent leur dernier souffle. S’ils me trahissent, je les traquerai jusqu’en enfer s’il le faut.
Mon pain quotidien c’est la douleur, ne croyez pas que je m’apitoierai sur votre sort, votre vie est dérisoire… Aussi éphémère qu’un flocon de neige.
Pourquoi est-ce que je me seule au milieu de la foule ? Pourquoi ai-je la sensation de ne pas vivre dans le même monde, de ne pas avoir su entrer dans la ronde. Je vous envie, je vous crains et je vous hais.

Description Physique

Un visage fin, un regard d’une tristesse qui semble ancrée au plus profond d’elle. Son regard bleu délavé semble vide de tout sentiment, comme appartenant à un autre monde. Toujours vêtue de noir, elle ne se dépare jamais de son chapeau qui jette un voile d’ombre sur sa peau très blanche. Ses lèvres sont fines, presque inexistantes et se retroussent jusqu’à disparaître totalement lorsqu’elle sourit.
Ce qui est d’une extrême rareté… En somme une madame tout le monde à qui l’on ne prête pas attention tant elle est discrète et effacée.

Histoire:

Nous sommes en 1915, mauvaise année pour naître, mauvaise année pour vivre. Pourtant c’est ce 5 octobre que choisit Tabissa pour aspirer sa première bouffée de poussière. Pour ouvrir ses petits yeux sur une maison délabrée, dont les charpentes sont rongées par les termites, et où la saleté a apposé sa marque sur chaque objet . Sans doute devrait-elle attendre un peu d’amour de la part de la femme décharnée qui lui servira de mère. Mais cet être est-il encore capable d’aimer, ses yeux las et vides sont-ils encore capables de se poser sur quelqu’un avec un tant soit peu de chaleur au fond de leur prunelle ?

La douleur est telle lorsqu’elle met Tabissa au monde qu’elle lui voue immédiatement une haine démesurée. Parce qu’elle ne haïssait jusque là qu’un concept, « l’ennemi ». L'ennemi, une foule de gens sans nom, sans visage, et qui la hait sans même la connaître. Elle-même les déteste depuis le premier jour, ces campagnards bornés qui la dévisagent comme si elle était un monstre. Parce qu'ils ne supportent pas la différence autant physique que morale qui existe entre eux. Parce qu'on lui a dit que si jamais un jour, des militaires la croisent et ont à souffrir son accent abominable, ils comprendront tout de suite qui elle est et d'où elle vient : une émigré polonaise, sans doute juive de surcroît ! Le bagage culturelle dont il valait alors mieux se passer. Son identité dévoilée, elle serait lynchée publiquement, sous les acclamations de la foule en délire ; on la détruirait et l'abaisserait jusqu'à ce qu'elle se considère à sa juste valeur : rien. Ce cauchemar venait la hanter toutes les nuits, elle se figurait sa mort comme une pendaison publique. On lui lancerait des fruits, des injures, et de la salive, et elle, elle ne serait pas forte. Elle hurlerait désespérément comme une victime innocente, mais en vain, elle se rendrait juste ridicule...

A présent elle a quelqu’un de bien réel à exécrer qu’elle peut blâmer directement, quelqu’un d’innocent et d’inoffensif qu’elle peut brutaliser à volonté sans avoir peur de représailles. Quelqu’un à qui elle peut reprocher la folie qui l’habite, et son corps révulsant. Ce bébé sans cesse pendu à son sein, qui tète désespérément le peu de lait qu’elle a. Il la mange ! Ce n’est pas du lait qu’il aspire à travers ses lèvres qui n’ont pas encore passées leur premier hiver. Il pompe son sang… Ses côtes saillantes, ses bras décharnés, c’est lui. Ses jérémiades forment un bruit de fond permanent, elle ne supporte plus l’odeur de merde dont la peau de ce rejet d’elle semble s’être imprégnée. Et comme si cela ne suffisait pas, il semble éprouver le besoin de la tourmenter jusqu’au plus profond de la nuit. Ce besoin d’affection qu’il étale impudiquement, ça l’écoeure ! Et elle hein ? Elle, qui lui donne de l’affection ? Son mari parti à la guerre, qui saute la première paysanne venue ? Alors qu’elle, ça fait combien de temps qu’on ne l’a pas baisé ?! Combien de temps qu’on ne l’a pas même désiré ?! Combien de temps qu’un homme ne lui a pas glissé à l’oreille juste avant qu’elle ne s’endorme, un simple « je t’aime » ?! Elle, elle s'épuise toute la journée dans les champs, elle se tue lentement pour pouvoir fournir un peu de lait à cette chose puante et hurlante avide d’amour. Pourtant elle fait tout pour qu’il la haïsse, quand il la réveille, elle le roue de coup, elle crache sur lui. Il aurait pu, il aurait dû en crever ! Mais pourquoi s'accrochait-il tellement à la vie ? Qu’est ce qu’elle avait fait au bon Dieu pour se coltiner ce marmot débile ?!

Hélas les états d'âme de Maria, on s'en fiche pas mal ! Finalement le destin donna raison à la mère de Tabissa. Elle rendit son dernier souffle au milieu de l’hiver. Mais Tabissa s’accrochait à la vie comme à une sangsue, elle avait survécu à sa mère, ce n’était pas pour mourir maintenant. Elle était évidemment couverte d’hématomes et elle peut remercier Dieu pour l’idiotie dont fit preuve sa mère… Jamais au grand jamais, elle ne frappa l’enfant à la tête, tout simplement parce que la bouille qui lui faisait face était celle de sa sœur. Elle ne l’aimait pas, mais ne pouvait se résoudre à démolir ce visage. A présent Tabissa était là, son avenir encore incertain, quelles mains bienfaitrices allaient recueillir ce bébé ? Certainement pas son père ! Elle n’avait pas de famille, alors que faire d’elle ? Les voisins qui découvrirent le corps de Mme kaczmarek déclarèrent d’entrée de jeu qu’il était hors de question qu’ils récupèrent Tabissa. Mais alors qui ? Toutes les personnes du village avaient eu au moins une fois affaire à Maria et à ses lamentations désespérées : « Elle mé toue, ce dimon mé toue ! ». Ce fort accent marquait, ces propos les faisaient autrefois bien rire, mais maintenant ? Et si jamais… si jamais c’était vrai ? Oui, elle était un peu folle, mais vous avez vu l’état de son corps lorsqu’on l’a retrouvé ? Ca donne la chair de poule… Les commérages allant bon train en rase campagne, la nouvelle eut tôt fait de se répandre dans les villages alentours. Ca fait froid dans le dos, n’est ce pas ? Enfin, croyez le ou non, certains –pour ne pas dire la quasi-totalité- des villageois en tinrent compte. Et se débarrasser de « l’enfant de Dracula » devint bientôt la préoccupation principale des villageois. Certaines femmes un peu sensibles tentèrent une faible opposition : « Commérages ridicules… beau bébé… comment peut faire ça ? » On leur rabattu vite le clapet, imaginez une bande de mères hystériques s’arrachant les cheveux en hurlant de tous leurs poumons : « Elle recommence ! Elle nous séduit ! Et elle va nous manger, l’impie !» Cela prenait des proportions exubérantes, d’aucuns commencèrent à parler de la brûler. Le petit détail bien sur omis était l’état du bébé en question, les traces de coups que Tabissa avait reçus étaient flagrantes. Il était temps de tirer la sonnette d’alarme… C’est ainsi qu’un des très rares enfants ayant réussi à s’extraire de la misère, à avoir une éducation, et surtout que les folles superstitions des habitants de son village natal n’affectaient pas, emmena Tabissa avec lui à la ville.

Ils roulèrent des heures durant, le paysage défilait avec lenteur, il se semblait répéter indéfiniment. Toujours les mêmes champs, toujours les mêmes cahots sur la route. Enfin les premières maisons parisiennes se dessinèrent à l’horizon, l’après midi touchait à sa fin. Le bienfaiteur de Tabissa habitait une petite et modeste maison avec sa femme et sa ribambelle d’enfants.–Suffisamment pour que monsieur soit exempté de partir à la guerre et subir toutes ses horreurs-. Ah, l’atmosphère n’avait rien de semblable à celle qui régnait chez Maria auparavant. L’odeur des transpirations mêlées donnait un caractère chaleureux et agréable à la maisonnette. Y vivre était extraordinairement plaisant. Louis aimait ses enfants. En fait il les adorait ! Il ne perdait jamais une occasion de les couvrir de cadeaux ou de jouer avec eux. Quant à sa femme, elle rayonnait, elle semblait évincer les moindres problèmes d’un revers de main. Du moins faisait-elle toujours tout pour que toute sa petite famille se sente au mieux. Cependant, il n’y a encore pas matière à se réjouir pour Tabissa. L’argent n’afflue pas assez pour nourrir une bouche de plus. On se pose d’abord la question de la placer, mais les chances pour qu’elle finisse à la rue sont immenses, alors il faut lui trouver une famille adoptive. Mais qui ? Qui voudra bien d’une enfant qui fut maltraitée et dont les origines sont incertaines… (vous l'aurez compris, bien trop heureux de se débarrasser du bébé; ils omirent « un tout petit détail » : Tabissa était polonaise.) Et si jamais quelqu'un finissait par découvrir qu'elle était une fille d'étrangère qui fût frappée par la folie ? C'est bien sur peu probable, mais si un notable l’acceptait, imaginez le scandale lorsqu’on découvrira cela !
Pourtant il faut bien qu’elle aille quelque part ! Mais pas chez n’importe qui, non… La petite famille avait fini par s’attacher à ce bébé un peu trop calme. Maintes et maintes fois, Louis avait conté à ses enfants et à sa femme les aventures de Tabissa. La folie de Maria, toutes les souffrances endurées par l’enfant et comment Tabissa se retrouve finalement accusée du meurtre de sa mère.
« Mais heureusement le vaillant Papa est arrivé et a sauvé Tabissa ! L’a arraché aux griffes des campagnardes folles et hystériques. »
Ah qu’il est vaillant le papa ! Mais trouvera-t-il quelqu’un pour s’occuper de sa protégée. Rien n’était moins sure, jusqu’au jour où le marquis de X… (Non, j’aimerais bien pouvoir dire ça, mais un autre destin attend notre héroïne)
On trouva enfin preneur pour la jolie petite fille, quelqu’un d’assez respectable se déclara intéressé par l’adoption. Il arriva un jour de mi-mai, Tabissa avait tout juste deux mois. N’importe qui aurait fondu devant ce petit bout aux joues bien roses, emmitouflé dans ses couvertures, et qui mordillait énergiquement ses petits poings en gémissant doucement. Thérèse et François ne firent pas exception, et quelques jours plus tard, Tabissa élisait domicile chez le jeune couple.

François et sa femme habitaient un petit appartement en bord de Seine, il avait dépensé une fortune pour offrir cette maison à Sa Thérèse adorée. Cette adoption qui peut paraître somme toute très banale et « dans les règles » pour le premier venu (quoique très rapide vous en conviendrez)a comme toute chose en ce monde sa part de noirceur. Comme je l’ai dit plus tôt la famille de Louis se serrait la ceinture pour pouvoir survivre, et si les choses continuaient ainsi, on fonçait droit dna sle mur ! Alors comment se faire de l’argent ? Eh bien : vendons Tabissa ! Avait-on jamais eu l'intention de la garder ? Non. Mais la donner serait laisser passer une trop belle occasion.
« Après tout nous ne faisons rien de mal, nous l’avons arraché aux griffes de ces femmes hystériques. Elle nous doit bien ça, ce n’est pas du commerce d’enfant, on récupère juste notre dû.»
Doit-on pour autant se réjouir du départ de Tabissa, la situation était-elle mieux chez François et Elisabeth ? Leur désir d'adoption sincère ?
Quelques mois plus tôt chez les Rozen :

La cigarette maintenue par les doigts souillés,
Se glissait nerveusement entre les lèvres de l'homme,,
Son regard impassible était perdu par-delà la ville et les toits,
Sa pensée aussi volatile que la fumée qu'exhalait la cigarette,
Regrettait-il de l'avoir frappé, regrettait-il les insultes fielleuses lancées à la figure de son amour ?
De toute son âme il espérait que la souffrance que ses mots et ses mains avaient infligées était insupportable,
Stérile. Le mot lui écorchait les oreilles,
La honte lui enflammait les joues, comment le sort osait-il encore se jouer de sa personne ?
Une douleur sourde lui nouait les entrailles,
Depuis quand le savait-elle ?Le désir de la laisser là, seule avec son fardeau le consummait tout entier,
Et qu'en dirait le monde ? Les injures s'abbatraient sur lui telles la colère divine,
Et de force lui courberaient l'échine.
Les langues fourchues des vipères parisiennes cracheraient leur venin,
Certes il craignait ces tourments, mais en cette stérilité il entrevoyait le Mal,
Et plus que tout il craignait les paroles de Mephistopheles :

« Je suis l'esprit qui toujours nie ; et c'est avec justice : car tout ce qui existe est digne d'être détruit, il serait donc mieux que rien n'existât. Ainsi tout ce que vous nommez pêché, destruction, bref ce que l'on entend par mal , voilà mon élément. »

Il sentait les yeux perfides de Lucifer sur sa nuque,
Il était fou de terreur,
Il serait donc mieux que rien n'existât,
La guerre, quand ces images de corps brisés cesseraient-elles de le hanter ?
Que rien ne puisse être conçu : stérile...
Mais qui ? Elisabeth ou... lui,
L'oeuvre du malin était en marche. Le corps de François réclamait un corps à mutiler,
Une voix lui susurrait que cela lui procurerait l'oubli...
L'espace d'un instant, l'oubli d'un mal puissant contre lequel rien ne peut aller,
L'initiative de frapper son amour appartenait à lui seul, cela on ne pouvait le lui commander...
Alors se sentant maître de lui même...

Il retournait la frapper, l'âme plus froide que le marbre.
Point ne cherchant à s'expliquer, peu importait qu'elle ne sache pas son tort.
Elle était l'objet de son irritation, alors de sa vengeance.
Elle était seule responsable.
Seule à devoir souffrir...


Les draps froissées étouffaient les sanglots de la créature blessée,
Ses yeux, sources intarissables de larmes, reflétaient l'incompréhension,
Le couverture enroulée était ramenée contre son ventre,
Elle hésitait à fuir ou à continuer de subir la colère de son amant.
Mais où s'exiler ?
François ne peut la rejeter, sa fierté est trop grande,
Jamais il n'avouera ce qu'il appelle « ton abomination »,
A tout mal, il existe un remède.
Mais son mal à lui... Elle est le remède,
Lorsque son bras s'abat sur elle, sa douleur soulage celle de son aimé,
Non, elle ne peut, elle n'a pas le droit de le laisser sur le bord de la route et de continuer...


Dernière édition par le Dim 4 Nov - 15:00, édité 7 fois
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Tabissa
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MessageSujet: Re: Tabissa [Validée]   Tabissa [Validée] EmptyVen 26 Oct - 23:59

Un semblant de compromis s'établit : « Tu restes, mais on adopte. »
Cette décision glace tout d'abord le sang d'Elisabeth, cela a évidemment sa part de risque. Si jamais aucun de ses traits ne correspondent à ceux de ses parents. Doucement les soupçons s'éveilleront...
On se met alors en quête d'un bébé... Et en parallèle on annonce tout autour : « Elisabeth est enceinte »
Dès lors la comédie commence, on place un masque sur son visage et fait le serment qu'on le gardera à tout jamais, le jeu de la femme enceinte peut sembler simple. Le mensonge permanent dans lequel elle vit mêlé à l'anxiété de ne pas trouver de bébé, et la routine qui s'est installée chez elle déteint sur le visage d'Elisabeth. Les cernes apparaissant sous ses yeux sont mises sur le compte de la fatigue lié à l'enfant, mais François sent le danger. Ses remontrances et ses coups ne suffisent pas à la convaincre de faire des efforts.

Au bout de quelques temps, il finit par comprendre qu'il est seul responsable de son lamentable état. Et il prend sur lui pour ne pas lever la main sur elle dès que quelque chose l'irrite un tant soit peu. Il voudrait un garçon, un garçon pour soutenir l'homme estropied... Pour soutenir le mâle blessé et impuissant. Cependant, la fausse grossesse d'Elisabeth arrivait à son terme. Le temps qui leur était dévolu pour trouver un enfant s'était écoulé... Ils prirent le premier nourrisson qui se présenta : Tabissa. Elle était toute petite, elle pouvait être confondue avec un nouveau né, seuls ses yeux trop souvent ouverts pouvaient faire douter. On pria beaucoup pour que le subterfuge ne soit point découvert. Pour une raison obscure, ils décidèrent de garder son prénom. Cela parut bien évidemment étrange aux yeux de leur entourage, ils se contentèrent d'hausser les épaules. Peut-être que conscients de voler sa véritable origine à l'enfant, lui faisaient-ils la faveur de laisser une petite trace de ses premiers deux mois de vie avec ce simple prénom.

Le landeau de Tabissa commença par trôner au milieu du salon. Il était le trophée qui marquait la victoire du couple sur la stérilité d'Elisabeth -parce qu'il était finalement apparu inconcevable à François, que lui, un homme, puisse être stérile-
Elisabeth se révéla vite être une bonne maman, elle aimait Tabissa comme si elle l'avait conçu. Et à partir de là, tout aurait dû bien se passer. Mais un jour une lettre arriva, celle-ci annonçait la mort du frère de François. La guerre lui avait tout pris, tout... Un gouffre s'ouvrit en lui, et la tristesse, le noir prirent possession son esprit. Il ne parlait plus, ne mangeait quasiment plus, ne la frappait même plus. Il était seul, prisonnier de ses lugubres pensées, il n'attendait plus qu'une seule chose... Que la Parque Atropos se décide enfin à couper le fil fragile qu'était sa vie. Mais les jours continuaient de s'écouler impertubablement, Elisabeth le maintenait désespérément en vie, sa trop grande faiblesse l'empêchait ne serait-ce que de protester. Plus rien n'avait de goût, tout ce qui l'entourait était laid et ennuyeux.

Enfin dans tout ça, Tabissa ? Commence à créer des problèmes...
Quatre mois que mademoiselle se porte comme un charme, cela ne la dérange pas outre mesure d'avoir un cadavre assis sur une chaise pour père. Elle mène son petit bonhomme de chemin, et tient assise. Et avec mamie ça coince :
Mais dis donc Elisabeth, ta fille elle tient déjà assise ?! C'est très étrange, non ?
Alors vas-y que je te tourne autour, que je t'étudie sous toutes les coutures...
- C'est... quoi ça ?!
- Hmmm ?
- T'as vu cette cicatrice ? On dirait que quelqu'un l'a lancé contre un mur !
- [...] Ah je t'avais pas dit ?
- Non !
- Elle est tombée de son berceau...
Une anecdote parmi tant d'autres évidemment ! On peut noter aussi que la morphologie et le comportement de Tabissa sont ceux d'un bébé de six mois et non de quatre. La situation est critique, ça jazze autour de la petite famille. Entre le père apathique et la fille étrangement précoce il y a matière à raconter ! Elisabeth trouve une solution radicale.
« Ils ne savent pas quoi raconter ? Je vais leur lancer un gros bout de viande qui va faire s'agiter leurs petites langues pendant quelques mois, et faisons d'un pierre deux coups : les maintenir à l'écart de Tabissa et de moi ! »
Avant toute chose, précisons qu'Elisabeth a pris elle aussi un sérieux coup sur la cafetière. Sa stérilité, la réaction de son mari face à la situation, le mensonge de sa grossesse, et l'état actuel de son amour. Il y a de quoi péter un câble, et bien elle s'en donne à coeur joie. Sa folie se manifeste par crises, parfois elle reste simplement prostrée pendant des heures en tenant la main de François. D'autres fois ce seront des ictus amnésiques.

Elle décide alors pour détourner l'attention d'organiser le suicide de son mari. Après tout sa foli est de notoriété publique ! Qui aurait l'audace de remettre en cause cet acte effrayant ?
Elisabeth chercha longuement dans son entourage l'acteur potientiel de ce rôle menaçant. Mais personne n'avait l'étoffe pour cela, tous des lâches se cachant les uns derrière les autres, acquieçant presque nerveusement à tout ce que dit Mme de Nerval. Femme on ne peut plus stupide en outre, alors rien à craindre de ce côté là.
C'est ainsi que quelques jours plus tard, un hurlement strident résonne au 27 rue Felix Faure.
Les pieds de François se balancent à 50 cm du sol, sa langue bleuie et gonflée pend impudiquement hors de la bouche de son hôte. Sa femme le regarde, la bouche fermée, les bras ballants, elle semble dans un autre monde. Peut-être essaie-t-elle d'accompagner l'âme de son François jusqu'aux cieux ? C'est en tout cas la version qui se répandit dans le tout Paris.
Et comme l'avait prévu Elisabeth, on eut tôt fait d'apposer le sceau du malheur sur elle et sa fille. On les voua à la pauvreté et la mort, en se persuadant qu'au fond on ne leur souhaitait rien de si cruel. Alors qu'on frétillait d'envie qu'un autre malheur s'abatte sur elle, pour pouvoir cette fois-ci dire : ils ont touché le fond.

10 ans plus tard...

Un trouble immense faisait le siège de l'âme de l'enfant. Au fond de ses grands yeux verts se lisaient l'amertume et la désillusion. Elle luttait contre l'envie d'aller se recroqueviller dans un coin et ne penser qu'aux larmes qui couleraient sur ses joues roses. Mais aujourd'hui, elle ne déposerait pas les armes. Quoi, elle la voyait comme un être faible et incapable de supporter les douleurs quotidiennes qu'inflige la vie. Mais cet affront elle ne pouvait l'essuyer en silence, les mots se déchaînaient contre ses lèvres closes. Lesquels choisir ? Lesquels inciseraient au plus profond la femme qui lui faisait face. Elle pensait qu'elle était stupide ?! Déjà Tabissa commençait à céder aux larmes. Si elle, sa mère, si même elle, elle mentait ! Alors en qui avoir confiance, dans quels bras se réfugier quand tout autour de nous semble s'écrouler.

« Tabissa, souviens toi je te l'ai dit...
Les lèvres de l'enfant s'entrouvrirent, si les mots partaient, elle n'était pas sur de pouvoir les arrêter...
- Tu mens ! Tu mens ! Tu mens ! Tu mens !
Ses yeux s'étaient ouverts démesurément, et elle hurlait de toutes ses forces.
Même toi tu mens... Est-ce que ça s'oublie ? Est-ce que tu oublies quand on te dit que quelqu'un que tu aimes doit mourir ? Tu crois que je suis pas capable de comprendre qu'un jour tout le monde meurt ?
- Tabissa, calmes toi... Tu as oublié, mais c'est pas grave ma chérie.

Elisabeth s'approcha de sa fille dans l'intention de lui passer la main dans les cheveux, pour la rassurer.

- C'est pas grave ma chérie. Quelle importance...
- Mais je suis pas stupide ! Je veux, j'ai le droit, je...
- Mais non, ce n'est pas grave tu sais. Mamie te manques hein ? Je sais, moi ausssi.

Mais pourquoi ne voulait-elle pas comprendre ? Elle n'avait jamais ressenti cela à l'égard de sa mère. Elle ne l'avait jamais haï... C'était... effrayant de ressentir ça. Tellement étrange, Tabissa se dit que ce n'était pas normal, elle recula d'un pas pour fuir à nouveau sa mère qui tentait de l'embrasser. Du coin de l'oeil elle vit la porte entrouverte et elle se jeta dehors à corps perdu. Une fois dans la rue, elle se mit à courir, elle allait où ses jambes voulaient bien la porter. Non, l'endroit n'avait pas d'importance, elle voulait juste être loin de cette femme.Sa respiration haletait à cause de ses sanglots incontrôlables, mais elle ne s'arrêtait pas. Elle sentait son coeur se jeter contre sa poitrine à des intervalles se rétrécissant Mais elle ne s'arrêtait pas pour autant... Courir, fuir le mensonge qui semblait la suivre comme son ombre...
Tout se mélangeait dans sa tête, elle ne comprenait pas que Dieu puisse lui faire cela. Elle n'admettait pas que sa mère ne soit pas parfaite. Elle n'admettait pas que ses lèvres puissent proférer des mensonges. Elle n'admettait pas qu'elle puisse la faire souffrir. Elle n'admettait pas que cet être était banal, et impur. Impur...
Mais ses pleurs n'y changeaient rien. Toutes les injures qu'elle proférait intérieurement étaient inutiles. Tout ce qu'elle ferait n'y changerait rien. Tabissa grandissait. Fini le temps où l'on buvait les paroles de ses parents comme si elle étaient la Vérité. Fini le temps où la seule chose qui comptait était de leur plaire par tous les moyens.

Tabissa ne savait pas comment extraire cette boule imaginaire de sa gorge. Ni comment dénouer ses entrailles. Se prendre la tête entre les mains et se torturer les méninges ne servait visiblement à rien. Son impuissance lui apparaissait maintenant une évidence. Son impuissance face à elle-même et face aux autres. Elle se sentait infiniment seule sous ce pont de pierre. Les bruits de pas des passant résonnaient sous l'arche de pierre, mais personne ne venait la consoler. Comment auraient-ils pu savoir qu'elle était là ? Mais ils auraient dû le savoir... La proximité entre elle et eux n'était pourtant pas si grande, et pourtant leur esprit était inaccessible. Chaque esprit était scellé, et personne d'autre ne pouvait par aucun moyen briser le seau. Pourquoi le monde était-il si cruel ? Pourquoi tant de secrets ?
Peut-être que sa mère avait raison... Peut-être qu'elle n'était pas prête à affronter la réalité, peut-être qu'elle était trop faible, peut-être ne serait-jamais capable de l'affronter...
Et à quoi bon se battre lorsqu'il n'existe aucun espoir...


2 ans plus tard...

Le vase se brisa sur le carrelage et les éclats fusèrent à travers toute la cuisine. Tabissa sortit de la pièce comme un ouragan et courut se réfugier sous la cage d'escaclier. Une fois à l'abri, elle se recoquevilla sur elle-même et plaqua ses mains sur ses oreilles. C'était l'heure... Elle ne laisserait pas encore aujourd'hui les jurons de « l'homme bourré » lui écorcher les oreilles. Il devait être bien imbibé, il n'allait sans doute pas tarder à entamer son monologue déchirant sur ses conditions de travail inhumaines, et puis suivant la routine : il descendrait un nouveau verre de whisky. Sa gorge émettrait une douce mélodie de borborygmes immondes. Ensuite Elisabeth s'offusquerait pour la forme, et puis il commencerait la plotter... Et, ah ça commence !
Ben tiens ! Quand j'te dis qu'ils veulent nous tuer ! Nous traite comme des chiens. Pis tiens, on n'a qu'à crever, s'en foutent fichtrement ! Ah bordel, croient tout d'même pas qui vont nous baiser comme ça ?! Hé, avec leurs costumes à carreaux s'croient plus forts. C'qui savent pas c'qu'on a dans le ventre !
Je vous épargne la complainte de l'ivrogne, si encore l'alcool lui inspirait de belles paroles...
Malheureusement notre homme n'a rien d'un intellectuel ! En temps normal il fait partie de ces gens qui massacrent la langue française... Le cerveau embrumé par les vapeurs éthyliques, éspérer un monologue digne de Matamore serait se faire du mal inutilement.
Tabissa n'arrive pas à rire des propos de l'ivrogne, ce n'est pourtant pas faute d'avoir essayé... car rien n'est plus déprimant je vous assure que de se voir chaque soir assomer par les tirades grotesques du beau père fin saoûl. Mais pourquoi avait-il fallu qu'elle le choisisse lui ?! Non, sérieusement, il ne pouvait exister homme plus répugnant. Il alliait le ridicule, la vulgarité, l'indécence, l'impudeur, la négligence de soi, la laideur comme personne ! Oh merde, et dire que chaque soir il se la tappait ! Des larmes coulèrent le long des joues de l'adolescente... Elle entoura ses jambes de ses bras et appliqua sa bouche contre ses genoux nus. Ses mains se rouvraient et se refermaient convulsivement, laissant des traces rouges sur sa peau. Elle attendait.

Elisabeth devait être en train de ramasser les bouts de verre épars. Tabissa imaginait Renaud la contemplant de son regard vitreux. Ses pensées étaient limpides : « Bon Dieu, quel cul t'as ma belle ! » Tabissa frissona d'horreur, comment pouvait-on désirer le contact des mains poilus et pleine de sueur de cet espèce de gros porc sur son corps... Ca lui donnait des hauts le coeur...
Une fois son désir assouvit, Renaud monta doucement les escaliers. Tabissa retint sa respiration, quelle serait sa réaction quand il soulèverait la couette, espérant trouver le petit corps tremblant de peur de la jeune fille ?
« Tabissa ?! »
Elle réprima un sanglot.
Pitié, pas aujourd'hui...
Plus jamais, s'il vous plaît.
Elle se mordit le genoux, la bave qu'elle y déposa fit glisser ses lèvres sur sa peau. Un hoquet aigu s'échappa d'entre elles. Elle s'enfonça violemment son poing droit dans la bouche pour se faire taire. Mais il était trop tard, le son s'était échappé... Une vague de panique l'envahit, et tous ses membres se mirent à trembler..
« Ah... Tu t'es cachée et tu veux que je te trouves ? »
Sa grosse main glissa le long de la rampe d'escalier.
Non, non, non, non...
Lorsqu'elle vit apparaître la silhouette devant elle, une lueur d'espoir s'alluma en elle. L'oreiller. Cet imbécile avait oublié l'oreiller pour étouffer ses cris... Elle ouvrit la bouche pour hurler ; elle ne vit qu'au dernier moment le poing qui alla s'écraser au milieu de sa figure. Aucun son ne sortit de sa bouche. Son nez devint fontaine de sang, le liquide sillona le long de la gouttière au dessus de sa bouche, puis il coula sur ses lèvres et se glissa par l'instertice pour aller répandre son goût écoeurant dans la bouche de Tabissa. La force du coup l'avait un peu sonné, si bien qu'elle oublia un court instant la présence de son agresseur. Les doigts de l'homme vinrent se refermer sur son cou, et d'une main il la souleva. Approchant sa tête de la sienne. Un sourire satisfait planait sur ses lèvres, il n'avait plus qu'à...
- Qu'est ce que tu fais ?! Qu'est ce que tu fais à ma fille ?!
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Tabissa
Pierrot the Clown - hystérique, moua?!
Tabissa


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MessageSujet: Re: Tabissa [Validée]   Tabissa [Validée] EmptyVen 2 Nov - 18:21

La voix stridente d'Elisabeth refroidit instantanément les ardeurs de l'homme. Il ne savait pas encore ce qu'il allait faire, il se contenta de faire volte face et de planter son regard noir dans celui de sa femme. Quant à elle, ses yeux écarquillés passaient de Tabissa à Renaud, et elle cédait à chaque instant un peu plus de terrain à la panique. Elle se sentait trahie, souillée, comme si c'était elle qui se faisait violée chaque soir depuis un an. Elle restait plantée là, les bras ballants, incapable de déchaîner sa rage contre Renaud, mais pas plus capable de consoler son enfant qui pleurait. L'indécision, l'impuissance. C'était si douloureux, elle n'était plus sure... Son mari voulait... allait violer sa fille, c'était non... impensable ! Le visage de Tabissa couvert de sang, la jambe gauche de Renaud sécouée de spasmes, ceci si caractéristique de son excitation ne laissaient pas place au doute. Pourtant quelque chose en elle continuer de nier, elle ouvrit la bouche, mais les mots s'étouffèrent dans sa gorge. Le temps semblait s'écouler avec une extrême lenteur, elle aurait voulu ne pas l'avoir découvert. Parfois un tissu de mensonges vaut mieux qu'une vérité cruelle. Mais elle ne pouvait plus reculer...

Tabissa s'était écroulée sur le sol et regardait la scène avec terreur. Elle ferma les yeux et se mordit la lèvre pour s'empêcher de hurler. Cette envie de crier lui brûlait la gorge, elle voulait, peu importe que ce désir soit immoral, que Renaud se tortille à ses pieds comme un ver de terre, térrassé par la douleur. La douleur du remord, des coups qui auraient dû s'abattre sur lui, des hurlements suraigus qui lui déchireraient les tympans... Pourquoi sa mère ne le frappait-elle pas, elle aurait dû se jeter sur lui et le rouer de coup. La violence était le seul recours. Mais il ne se passait rien... Elle sentait un désir violent naître en sa mère, et elle n'en était que plus désarçonnée. C'était impossible... Tabissa refusait d'avoir à assister à ce qui se passerait ensuite, mais elle ne pouvait pas fuir, ses jambes refusaient de bouger. Et quelque chose l'attirait irrésistiblement, plus fort que la peur et le dégoût qu'elle éprouvait. Elle ne pouvait détacher son regard des deux adultes, elle voulait savoir. Savoir pour qui sa mère prendrait partie, savoir si on l'aimait vraiment, savoir si cela valait la peine d'aimer ; ou si la trahison vaincrait toujours.

Renaud approcha son visage de celui d’Elisabeth, elle ne sourcilla pas, resta parfaitement impassible. Il approcha ses lèvres de son cou et y déposa un doux baiser. Elisabeth voulait le repousser, lui hurler qu’elle ne voulait plus. Mais sa résistance trop faible cèda au désir grandissant. Ses yeux se fermèrent doucement, elle s’abandonna à lui, à ses caresses ou à sa violence. Elle était à lui. Un sourire sardonique se dessina sur les lèvres de l’agresseur de Tabissa, quoiqu’il fasse… Quelque soit la manière dont il agisse, elle ne se dresserait pas contre lui. Elle lui appartenait…
Si cela échappa totalement à la raison d’Elisbateh, sa fille saisit parfaitement la pensée de Renaud. Elle sentait le goût âcre de sa salive sur ses lèvres sans qu’il ait besoin de la toucher.
L’adolescente se courba, la tête entre ses jambes écartées et elle vomit. Ses tripes rejetèrent cet homme, et l’amour de cette femme. Tout tournait autour d’elle, elle voyait vaguement deux formes étroitement enlacées. Au dessus d’elle, l’escalier semblait se mouvoir, il se tordait en tout sens et se rapprochait inévitablement d’elle. Il l’enveloppa dans son linceul et la plongea dans le noir, la solitude....

Le désespoir l’enlace comme un merveilleux amant,
Lui est toujours là,
A l’affût du malheur,
Compagnon de route des âmes torturées,
Ses doigts invisibles la soutiennent,
L’empêchent de sombrer dans l’inconscience,
Empêchent ses paupières de voiler son regard.

Il est dans ses larmes brûlantes,
Il serpente le long de ses joues et se glisse entre ses lèvres,
Il coule le long de sa gorge et se dépose dans tous les pores,
Il envenime chaque parcelle de corps,
Il se prélasse dans ses entrailles bouillonnantes,
Prêt à être à nouveau vainement expulsé…

Il s’applique à faire voler le fragile équilibre de Tabissa en éclats,
Si jeune…
C’est si doux de faire pleurer un ange,
Si doux de provoquer la souffrance
Toujours, toujours le désespoir vaincra…
Un rire cristallin se répercute dans sa tête,
Si fragile…
Regarde, regarde les se caresser,
Toi, tu n’existes pas…
Elle sombre dans l’oubli.
L’être recroquevillé sous la cage d’escalier est un songe,
Un fantôme, un halot de douleur que l’on étouffe,
On hait les âmes en peine,
Dangereusement contagieuses.

Une barrière invisible la sépare du couple,
D’un côté le plaisir, de l’autre la souffrance…


5 ans plus tard…

Tabissa remontait une rue pavée, une main posée sur son chapeau pour empêcher le vent de l’emporter. Ne pouvant attraper le couvre chef noir, il se vengeait en s’infiltrant en dessous de son manteau, découvrant sa jambe jusqu’à la cuisse. Le jour venait de se lever, elle se réfugia dans le bar des adieux. Elle traversa un nuage de fumée avant d’atteindre le comptoir.
Une énorme main attrapa son épaule et ses gros doigts serrèrent sa clavicule comme un étau. La grosse voix du patron résonna dans toute la pièce :
« T’es en retard, pourquoi tu crois que j’te paie ? »
Quelques clients ricanèrent, esquissant des sourires édentés, Tabissa ne leur adressa pas même un regard. Elle murmura un vague « désolé » d’une voix parfaitement neutre puis alla poser ses effets sur le porte manteau poussiéreux de l’arrière salle :
- Commence par laver les tables, t’aurais dû faire ça hier soir !
- Je vous ai expliqué que…
- Et déranges pas les clients qui sont déjà là.
La jeune femme se dirigea d’un pas traînant vers les tables sales surveillant du coin de l’œil les hommes attablés. Ce soir vers sept heures ils reviendraient pour se prendre un petit verre de whisky. Puis deux… Ils finiraient par rentrer chez eux complètement saouls, le dîner prêt, ils n’auraient qu’à mettre leurs pieds sous la table et manger en lisant le journal. Elle, elle avait décidé de ne jamais souffrir d’être traité comme un chien par son homme.
- Qu’est ce que tu fous bordel ! Tu rêves ?!
- N-non…
Et ça semblait déjà commencer… La journée se déroula comme à l’habitude, elle voyait à peine les clients qu’elle servait, constamment perdue dans de morbides pensées. Elle ne s’en extrayait que pour repousser sèchement une main baladeuse ou mettre dehors un ivrogne qui commençait à trop s’échauffer. De cinq jusque neuf heures environs, elle n’arrêta pas de courir en tout sens. Un flot de personne se déversait autour des tables, puis repartait en ayant bien pris soin de laisser derrière eux un véritable champ de bataille. Les oreilles de Tabissa bourdonnaient, ce bruit de fond constitué de rires, de plaintes, et de bruits parfois très étranges l’étourdissait. Elle finit sa journée plus tard qu’à l’ordinaire. Lorsqu’elle sortit du bar, l’atmosphère s’était considérablement refroidie. Sa bouche exhalait une légère fumée à chaque respiration.

Enfin tout était calme, quelques vagabonds traînaient encore dans la rue. Seul le bruit régulier des talons de Tabissa martelant le pavé se répercutait contre les murs. Elle s’engouffra dans une ruelle étroite, sur le mur en face d’elle, elle pouvait voir deux ombres se mouvoir. Parfois elles se fondaient en une seule forme étrangement tordue, et l’instant d’après elles se divisaient violemment. Leurs gestes étaient rapides et fluides, le personnage le plus imposant plaqua sa main contre le visage de son partenaire et semblait tenter de l’enfoncer dans le sol, la seconde forme se rétracta, le bras de l’autre paraissait sortir de sa tête. En faisant un arrêt sur image, on pouvait imaginer que c’était un éléphant accroupi dont la trompe accouchait d’un humain élancé. Ils semblaient exécuter une danse endiablée, mêlant violence et beauté. Un spectacle auquel seule Tabissa assistait, elle s’approcha du mur à une distance raisonnable et s’assit en tailleur sur le sol. Elle tournait la tête en tout sens, laissant libre cours à son imagination pour interpréter la nature des formes qu’elle voyait. Des éclats de voix lui parvenaient. Soudain la plus grande forme noire jeta l’autre plus chétive à terre. Fini la danse, place à la violence. La silhouette debout fondit sur l’autre sans crier gare, et les deux ombres ne firent qu’une quelques secondes. Un cri de femme s’éleva, mais la nuit l’aspira, ce soir personne ne viendrait en aide à la jeune femme. Les éléments en avaient décidé ainsi, alors Tabissa n’irait pas contre leur volonté. Elle se leva et retourna sur ses pas, abandonnant la victime à son triste sort.

1944

La guerre, ce fléau qui nous touche tous, quelque soit la couleur de notre peau, nos idéaux, nos religions… A cause de cette palette de différences qui s’agrandit de jour en jour.
Encore et toujours réécouter les interminables et insensés discours du nain brun qui clame la puissance et le droit au pouvoir des géants blonds. Et pour cela écrase la vermine non aryenne. Beaucoup subissent en silence, se taisent par prudence même s’ils réfutent totalement les idées racistes et antisémites des nazis. L’apparente neutralité n’est cependant pas un bouclier contre les bombes qui se fichent pas mal que l’on soit aryen ou juif quand elles tombent au hasard. La main d’Hitler ne guide pas les bombes sur les sangs impurs. Les balles ne dévient pas leur trajectoire pour aller se ficher dans les corps non aryens.

C’est ainsi que des corps affreusement mutilés gisaient sur le sol. Une main blanche dépassait des décombres d’une maison. Les gens hurlaient et couraient dans tous les sens, c’était inutile ils le savaient bien, mais cela leur paraissait sans doute mieux que de rester sur place la bouche entrouverte à regarder, sans pouvoir détacher les yeux des cadavres. Alors on courait, sans chercher à aider… Pourtant le pouls de cette main battait encore. Et soudain, un homme s’approcha et pris le poignet. Il resta quelques secondes, tentant de sentir même une faible palpitation, de faire abstraction quelques instants de l’horreur qui l’entourait.

« Elle vit ! »

Cela ne s’adressait à personne en particulier, il cherchait juste à se redonner de l’espoir. Les gens étaient trop affolés, déboussolés pour venir l’aider. Il commença à dégager le corps des décombres. La foule sortait lentement de sa torpeur, on vint lui prêter main forte. On finit par extraire le corps de Tabissa des gravats. Finalement ce n’était pas une idée lumineuse de quitter Paris pour Londres… Elle fut transportée à l’hôpital, et on lui prodigua des soins. Mais elle était dans le coma, et on soignait en priorité ceux qui avaient des chances évidentes de s’en sortir. Elle était condamnée, son état empira rapidement. Et ce fut à la fin du mois de juin que Tabissa fit ses premiers pas dans la vallée enneigée d’Hollow Dream.

_______________________________


C’était véritablement étrange comme sensation… Elle ne se sentait plus elle-même. Tous ses membres engourdis, le froid la transperçait. La seule chose dont elle était sure était qu’elle était frigorifiée. En vie ? Rien n’était moins sur…

Au bout de quelques heures Tabissa rencontra une enfant, perdue comme elle. Elle se donna le rôle de mère protectrice à l’égard de cette petite fille. Ce petit jeu dura un mois, elle eut un aperçu de ce qu’elle avait raté sur Terre. Elle n’avait pas fondé de famille, pas eu d’enfants… Alors elle se raccrochait à la vie, à l’espoir qu’elle se réveillerait ! Mais un matin Mary avait disparu, et Tabissa eut beau cherché dans tous les recoins, il n'y avait pas trace d'elle. L’avait-elle trahi à son tour ? Elle alla voir les autres humains mais personne ne l’avait vu. Peut-être s’était-elle éveillé, oui, l’espoir avait porté ses fruits !
Mais il s’avéra qu’elle s'était transformée en chimère, ces êtres méprisables... Tout devint noir, le froid se fit plus présent, transperçant, devint son seul compagnon. Le désespoir la prit à nouveau par la main pour ne plus jamais la quitter… Elle se fit ombre.

Elle errait seule, chassait seule, et demeurait dans le passé. Elle revivait chaque instant de ce mois passé avec « sas » fille, et plus le temps passait, plus il semblait avoir été magnifique, mais il se faisait lointain. Alors le désespoir crût, la rancœur apparut. Elle était ombre, c’était irrémédiable, l’espoir… l’espoir que ressentaient les humains lui donnait envie de vomir, torturer ces chers esprits remplis d’espoir commençait peu à peu à lui plaire…

Pendant près de 60 ans elle vécut ainsi. Et la vallée se mit en colère, la força à aller avec les autres pour ne pas mourir. Les bêtes étaient trop dangereuses, elle ne pouvait continuer de vivre seule.
C’est ainsi qu’elle refait surface, totalement dépassée par les évènements. Elle ne sait pas qui est Vincent et n’a pas connaissance des alliances passées et défaites.

Comment avez-vous connu Hollow Dream? Par Tour de Jeu
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Mary Malone
Without a trace
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MessageSujet: Re: Tabissa [Validée]   Tabissa [Validée] EmptyDim 4 Nov - 13:47

Magnifique, quelle noirceur et quelle belle façon de nous faire plonger dans la folie et l'horreur!

Fiche Validée, bon jeu dans la Vallée!
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