Entre ombres et lumières...

Il n'y avait pas un bruit sur ce chemin de terre couvert par les feuilles mortes. Pas un bruit ou presque. Un petit courant d'air caressait tendrement les branches dénudées des arbres qui cachaient le ciel, rythmant inlassablement la sinistre danse de l'allée. Pas âme qui vive, pas de créature, un endroit où seul le manque de pleine lumière pouvait dissuader les bonnes volontés de s'y promener. Pourtant, il y avait quand même un peu de luminosité, sur ce sol ou la lumière pâle bataillait à corps perdu contre l'ombre en quête d'un peu plus de terrain à couvrir de sa douce chaleur.

Mais non, la guerre était perdue d'avance, n'est-ce pas? L'ombre étouffera toujours la pauvre lumière mourante sur cette allée. Un peu comme les vrais Ombres étouffent tant qu'elles le peuvent le peu d'espoir voué à disparaître, un peu comme Myst s'évertuait à tuer un peu plus Carmen. Les lèvres pâles de la joli danseuse étaient closes, ne laissant échapper que dans un murmure le chant oublié d'une adorable berceuse. Ses petits pieds entourés de chaussons de danse malmenés avançaient en demi-pointes sur le sol, ne laissant à l'instar de ses lèvres qu'un vague murmure transparaître lorsqu'elle déplaçait une feuille morte. Ses paupières en partie baissées laissaient à penser que ses yeux noirs ne suivaient que ses pas. Même ses bras, ondulant au ralenti sous les manches déchirées par endroit paraissaient superflus pour maintenir son équilibre déjà parfait.

Un pas, un autre, léger piquer avant de reposer le pied, petite pirouette... Elle se figea, ses bras retombant doucement le long de son corps, ses mains se courbant pour adoucir ce geste comme se doit de le faire toute danseuse qui se respecte. Elle se baisse, tendant la main vers le sol, cueillant une feuille aux belles teintes orangées, et la lève devant ses yeux de ténèbres. Le chant était mort derrière ses lèvres, elle paraissait simplement contempler les jolies couleurs que l'éternel automne avait donné à cette feuille. Puis dans un faible craquement, cette dernière se brisa entre ses doigts. Non, Myst, elle n'aimait pas la teinte chaude. D'ailleurs elle répendait maintenant avec un profond mépris les restes écrasés de la feuille morte. Terrée dans les ténèbres, Carmen pleura, mais Myst, elle s'empressa d'essuyer les larmes rouges qui voulaient s'échapper de ses yeux.

Elle releva lentement les bras, se hissa sur la pointe des pieds, refit un pas, un second, et se figea à nouveau. Un faible courant d'air fit voler quelques mèches blanches devant ses yeux, mais plus que tout, un murmure qui n'était ni celui du vent, ni celui de ses pas était venu effleurer ses oreilles...

[Pour qui veut! ^^]

*Tiens, elle est nouvelle celle là!*

Brillante déduction, si l'on peu s'exprimer ainsi. Une jeune femme à l'allure fantomatique avançait nonchalament dans la forêt, d'un pas léger et moyennement rapide. Soren avait très souvent l'habitude de trainer par ici lorsqu'il avait asez d'energie pour vivre, errant seul parmis les arbres. C'est pourquoi la vision de l'inconnue l'intriguait un peu. Elle était belle comme le jour, simplement, elle possédait bon nombre des caracteristiques des ombres. Elle aussi avait dû perdre espoir. Mais l'ancien bibliothécaire pensa qu'il fallait l'avertir des dangers de la forêt. C'est en sortant légèrement qu'il toussotat bruyament afin d'atirrer l'attention de la jeune femme...

La demoiselle se laissa simplement redescendre de sa pointe des pieds jusqu'à épouser pleinement le sol. A nouveau, ses bras redescendirent le long de son corps, et, dans un mouvement si grâcieux qu'il en paraissait d'autant plus excentrique, elle fit volte face. S'approcher d'elle en toussotant, voilà qui exrpimait un manque d'hostilité. Tant mieux, la discussion n'en serait que plus amusante! Ses yeux entièrement noirs se posèrent sur la nature de son dérangement, et, peut-être malgré elle, une pointe de tristesse vint déformer ses traits. Pas de proie, non, juste un camarade de race. Ses mains vinrent simplement se rejoindre devant elle, elle baissa un instant les yeux avant de les relever de nouveau, troquant son air de tristesse contre un simple sourire.

Elle fit à nouveau quelques pas, sans jouer cette fois, se rapprochant simplement de cette Ombre, camarade ombre. Il lui semblait l'avoir déjà apperçu, mais de loin peut-être, ou peut-être pas... Enfin qu'en savait-elle? Il lui arrivait de s'emmêler les pinceaux quand il ne s'agissait ni d'ennemis ni de proies.

"Bonjour, bonjour, si le jour existe encore. Vous, ami je n'en doute point, pourrais-je avoir votre nom?"

Elle se figea à nouveau, inclinant la tête pour considérer le personnage face à elle. Si il savait qu'elle était loin d'être nouvelle... Juste très discrète, assez pour qu'on ne fasse pas attention à sa présence, sauf quand elle se laisse aller à la distraction, un peu comme maintenant. A la différence près que ce n'était pas nécessairement un collègue qu'elle aurait voulu attirer... Mais qu'à cela ne tienne! Elle aurait un être à analyser, un être qui servirait d'exemple pour donner une leçon à sa Carmen.

*Et ben elle est pas farouche celle là!*

Que de pensée crues et stupides, mais on excusera Soren pour son manque de conaissance dans tout ce qui concerne le domaine social; en plus particulier ses relations avec les femmes, qui affichaient vide total depuis sa naissance, sa pseudo-mort n'ayant pas arrangé les choses... Il entreprit cependant de répondre a celle dont il avait grossièrement interompu dans sa promenade...

"Je me nomme... Soren... Et vous?"

Quelques difficultés dans la voix. Cette jeune femme a l'allure d'esprit n'allait pourtant pas le dévorer. Mais il était étrangement intimidé par son interlocutrice, ironie du sort sachant que c'est lui qui l'avait abordé...

Pas farouche, non. Ou si peu avec les siens! Pourquoi craindre ceux qui comme elle se faisaient craindre? La même base, des comportements variés, mais toujours ce seul et unique but. Curieuse peut-être, ou peut-être pas, elle fit un pas de plus, considérant avec plus d'attention l'étrange personnage. Quelques difficultés dans la voix? Pourquoi donc? Le sang ou les yeux? Oh non, Myst, elle ne fait pas peur à ses semblables. Mais c'était tout aussi amusant!

"Soren... Soren... "

Elle détourna un instant les yeux, regardant les branches mortes entremêlées où la lumière se disputait avec le bois, cherchant péniblement et surtout inutilement un chemin pour atteindre le sol.

"Pas nouveau, ce nom. Cela fait longtemps... Combien de temps déjà?"

Elle baissa à nouveau les yeux, balayant avec sa main l'air devant elle, secouant la tête sans se soucier d'emmêler d'avantage ses mèches blanches.

"Non non, ce n'est pas important le temps. Moi c'est Ca... Myst! Myst, depuis quelques temps déjà... Aussi... Enfin je crois."

Puis un pas de plus, encore plus près du jeune homme, elle redressa la tête, le sourire refaisant son apparition sur ses lèvres pâles.

"Mais peu importe le temps. Enchantée, Soren!"

Etrange. Très étrange, voila comment on pouvait qualifier la jeune ombre qui faisait face a l'ancien bibliothécaire. Comment le connaissait-elle? Serais-t-il possible qu'il ai passé tout ce temps ici sans jamais la croiser? Questions aparament sans réponses, réponse qu'il s'eforça de donner a son interlocutrice malgrès la difficultée. En effet, Soren n'avait jamais été aussi près d'une personne du sexe opposé, et, indubitablement, cela le mettait grandement mal a l'aise. Il balaya néanmoins ses mèches brunes comme pour répondre a Myst dans un language inconciament instinctif...

"Effectivement je suis ici depuis... une bonne vingtaine d'années, je ne compte plus trop depuis ma transformation... Mais je vous vois ici pour la première fois et... je doit vous avouer que je vous croyais nouvelle... Aurai-je pu... ne pas vous voir pendant toutes ces années?"

*La politesse!*

"Enchanté moi aussi, Myst..."

Soren venait de dire cette dernière phrase un peu maladroitement, toutes ces années d'errances solitaires lui ayant un peu fait oublier les règles élémentaires de savoir vivre...

Pauvre, pauvre bibliothécaire. Oui, elle devait être un peu trop près Myst maintenant qu'elle y pensait. Un peu trop curieuse aussi, ça ne se faisait pas. Elle recula d'un pas, simplement, ses mains se détachant pour venir se joindre dans son dos. En rien ses orbes noires ne s'était déviées de l'objet de sa curiosité, mais au moins, elle paraissait un peu moins proche, un peu moins ennuyeuse. Mais amusée, elle libéra une de ses mains pour venir presser son indexe contre ses propres lèvres si pâles, mimant le "chut" qu'elle ne prononça pas.

"Possible possible. Carmen, elle dit que je suis discrète, trop discrète. Que l'on ne me voit pas ou qu'on m'oublie vite. Qui sait! Cela fait..."

Sa seconde main vint rejoindre la première et elle leva une seconde fois son regard vers les branches mortes, comme y cherchant le chiffre qu'elle tentait de compter en effleurant tour à tour chacun de ses doigts. C'était confus, si confus. Elle ne comptait plus, non. Mais elle suivait paradoxalement le cours du temps. Alors, comment devait-elle compter? Jours? Mois? Années c'était plus adéquat. Ses mains retombèrent le long de son corps, un long soupire franchit ses lèvres et elle reposa son regard sinistre sur son camarade.

"Trois fois deux mains de cycles... Trente ans? Ou vingt-neuf? Ou trente et un? Je ne sais plus, quelque chose comme ça."

Oui, quelque chose comme ça. Longtemps à jouer les Ombres dans l'ombre, à jouer entre les arbres, à ne se montrer que quand c'était nécessaire, à parfois éviter les siens. Non non, pas de peu ni de méfiance! Juste d'habitude. Des fois que la vilaine Carmen essaierait de se montrer sans que Myst ne puisse l'en empêcher. Non, les Ombres ne devaient pas voir Carmen. Et les humains devaient voir Myst, pour qu'elle se nourrisse. Voilà! Cela expliquait, elle se comprenait enfin.

"Oui, très discrète, trop même, mais ce n'est pas grave! On ne me voit pas, mais moi je vois beaucoup!"

Un sourire à mi chemin entre l'espièglerie et l'amusement étira ses jolies lèvres, ce qui curieusement ne semblait pas tout à fait coller avec son regard si... Sombre.

De plus en plus étrange. Comment avait-il pu louper une femme aussi lunatique et... aussi belle pendant toutes ces années? Elle était là depuis plus longtemps que lui et malgrès ses multiples errances solitaires teintées d'observations il n'avait pas été foutu de la repérer. Mais elle était en ce moment en train de lui parler d'un air détaché, rêveur et pourtant si sombre. Ses yeux noirs la rendaient a la fois plus froide et plus séduisante.

*Voila une ombre bien singulière... Je me demande...*

... ce qu'elle fait de particulier ici, ou errait-t-elle sans but comme lui... Encore une fois, Soren prit la parole avec difficulté... Il n'avait pas peur, il n'était plus trop intimidée mais... c'était bizarre. Indescriptible...

"Et... Que faites vous... ici? Enfin je veux dire, comment meublez vous... votre temps?"

A nouveau une de ses mains frêles vint se poser devant ses lèvres, étouffant dès sa naissance le petit rire amusé qui voulait lui échapper. La question était si vaste, et si précise à la fois. Trop précise sans l'être, alors que répondre? Myst mit quelques secondes, ses yeux se plissant d'espièglerie. Que répondre exactement à ce genre de question sans trop se dévoiler? Myst comme Carmen, elle ne dit pas toujours tout, mais en même temps, elle voudrait bien volontiers tout détailler en profondeur, aller au coeur des choses.

"Il y a toujours quelque chose à faire! Se promener... Danser... Jouer... Chasser!"

Comme emportée par ses propres mots, elle fit de nouveau quelques pas, sur le côté cette fois, tournant autour du bibliothécaire sans le lâcher des yeux, profitant aussi très certainement pour le détailler lui aussi, à défaut de trop détailler son propre discours. Gentil, cette ombre! Un peu différente des autres non? Curieux, aussi, mais surtout gêné, pourquoi? Elle se montrait gentille aussi, Myst, comme toujours avec ses semblables.

"Et vous, Soren? Votre présence sur le chemin montre un goût pour l'évasion, pour la solitude peut-être?"

Non, il n'était pas exactement comme elle. Un peu plus rêveur peut-être? Il ne chassait pas, sinon elle ne l'aurait pas entendu aussi clairement approcher. Ou du moins il n'aurait pas cherché à se faire remarquer et aurait passé son chemin en quête d'une proie humaine. Les pas de Myst s'immobilisèrent quand elle se trouva de nouveau face à lui, son sourire disparu pour ne laisser qu'une expression interrogative.

*Chasser... Une tueuse d'humains je présume... Elle est differente de tout ces maniaque que j'ai pu observé jusqu'a maintenant. De toute façon il semble que je sois la seule ombre totalement équilibrée dans les parages...*

Un peu autosufisant, le Soren. Il fallait encore une fois l'excuser. Avec tout ce qu'il avait vu depuis vingt-ans il jugeait quasiment sans connaître, même si cette jeune femme qui lui faisait face le troulait si profondément qu'il ne pouvait pas avoir d'avis tranché sur la question. En parlant de question, celle de son interlocutrice le laissat dubitatif quelques instant...

*Aimer la solitude... A la base je n'ai pas vraiment choisi...*

Devant la moue intérrogative de Myst, Soren s'empressa de répondre, ce petit manque de confiance en lui toujours bien présent...

"Je suis ici parce que... Pas que j'aime particulièrement la solitude... Sûrement un peu, tout comme... Vous. Je n'ai pas besoin de me nourrir en ce moment je suis... Rechagé, si j'ose dire..."

L'ancien bibliothécaire se risqua a parler d'un sujet qui pourrait eventuellement facher sa charmante consoeur...

"Et vous... Vous vous nourrissez comment?"

Ah la solitude... Un étrange sentiment que beaucoup recherchent, que d'autres subissent. Le recherchait-il, ce Soren? Vraiment? Elle n'en était pas certaine, mais elle ne pouvait dire qu'il mentait, alors la réponse la satisfaisait pleinement. Elle ne bougeait plus maintenant, apparamment également satisfaite d'avoir pu oberver le bibliothécaire de tous les côtés. Tous? Oh non pas tout à fait, mais c'était déjà un très bon début! Il ne faudra pas qu'elle l'oublie. Pourrait-elle l'oublier? Non, il est... Différent. Sans vraiment qu'elle ne sache pourquoi d'ailleurs.

"Solitude... Solitude... Une belle amie pour danser sur les chemins!"

Mais la question suivante soulevait plus d'interrogations encore dans le double esprit de la demoiselle. On ne saurait dire si elle réfléchissait ou non, mais l'espace d'un instant, son visage n'affichait plus la moindre expression, regardant fixement, presque de manière effrayante, le bibliothécaire. Oh non, elle n'était en rien agressive, juste pensive. Réellement pensive, cette fois. Pas comme si elle devait chercher un souvenir ou une vieille information. Fallait-il mesurer ses mots? Oh oui! On ne dit pas toujours ses petits secrets, même si ils n'en sont pas vraiment. Mais en même temps était-ce réellement un mystère pour ses semblables? Tous avaient le même but, quand ils jetaient leur dévolu sur une proie.

Elle fit un autre pas, déviant son regard sur la forêt, comme pour s'assurer qu'ils étaient vraiment seuls, qu'il n'y avait personne pour écouter leur conversation. Puis un pas de plus, elle était maintenant tout près de son camarade d'infortune. Puis ce fut sur la pointe des pieds qu'elle se dressa, allant approcher ses lèvres de l'oreille du jeune homme pour murmurer tout juste.

"Les Ombres se nourrissent comme elles vivent, dans le désespoir. Et les humains s'y jettent à corps perdu le plus souvent. Chacun a sa méthode et ses secrets pour infliger ses tourments aux innocents. Mais vous devriez le savoir, non? A moins que vos goûts diffèrent."

Soren continua a penser qu'il avait faché son interlocturice lorsque cette dernière changea d'expression, et il se raidit de peur lorsqu'elle approcha sa tête de la sienne. Il craignait un une quelconque morsure ou autre vampirisation. Même si a la base cela n'était pas le style des ombres, le fantôme en avait vu suffisament pour se mefier... de tout. Mais Myst ne fit que murmurer a l'oreille de l'ancien bibliothécaire. Le son suave de la voix de la jeune femme arrivait aux oreilles de son destinataire comme une douce et calme mélodie, le genre relaxant, malgrès les paroles qu'elle portait. Ainsi, aussi belle et douce qu'elle puisse paraître, elle torturait tout de même pour survivre. Mais les frayeurs qu'infligeait Soren n'étaient-elle pas une forme de torture? Pas trop le temps de philosopher, il fallait répondre. Et c'est en bégayant que le fantôme répondit a sa consoeur...

"Je... Je suis désolé... Je... Ne voulais pas vous offenser... Pardon!"

Effectivement c'était pire que tout mais le cerveau de notre protagoniste réfléchissait a bien trop de choses bien trop vite pour faire quoi que se soit correctement. Néamoins il sentait quelque chose, comme si lui et Myst étaient dans une dimension parralèle ou quelque choses du genre, comme si le temps avait suspendu son court, comme si l'atmosphère glaciale de cet endroit devenait plus chaleureuse... Toujours tétanisé, il ne respirait presque plus. La jeune ombre était toujours aussi près. Mais étrangement la peur était partie. Allez savoir pourquoi l'ancien bibliothécaire n'arrivait pas a desserer les dents...

La demoiselle ne bougea pas d'un centimètre en entendant les mots de Soren. Etrangements, ses lèvres s'étirèrent lentement en un petit sourire, non loin de l'oreille du jeune homme. Oh, elle n'était pas offensée, tout le monde avait le droit de poser des questions. Les questions ne froissent pas, ce sont seulement les réponses qui peuvent déranger. Du moins c'est ainsi que l'esprit un tantinet farfelu de Myst voyait les choses. Elle leva tout juste une main, effleura à peine le visage de son confrère, juste comme ça, sans trop savoir pourquoi, reprenant simplement dans un murmure.

"Offenser... Je ne suis pas offensée. Je répond, n'est-ce pas ce que vous vouliez, Soren?"

Sa main retomba tout naturellement et elle s'écarta, sans se départir de son sourire. Etrangement, elle avait cette impression de jouer un peu, comme elle pouvait le faire avec une proie, sauf que le jeune homme n'était pas une proie. Juste quelqu'un comme elle, mais curieusement différent. Il avait paru gêné, nerveux? Elle n'avait pas été menaçante pourtant. C'était... Divertissant, bien plus que ses autres jeux plus pervers! Elle ne fit cependant pas d'autre pas en arrière, restant somme toute plutôt proche, son regard revenant se planter dans celui de l'Ombre.

"Mais vous... Vous jouez aussi? Ou moins? Vous chassez qui? Pourquoi et comment?"

Elle en revanche ne semblait pas vouloir se gêner le moins du monde pour poser ses questions. Mais plus que les mots, c'était les expressions qu'elle voulait lire, du moins elle pouvait le laisser supposer. Elle ne cillait pas, fixait inlassablement Soren, comme on le ferait avec un curieux animal. Oui, il était bien curieux, le bibliothécaire. un peu agité peut-être? Il lui semblait avoir senti sous ses doigts une mâchoir un peu trop crispée pour être à l'aise.

Destabilisé, c'était surement le mot qui convenait le mieux pour décrire l'état d'esprit du bibliothécaire. Il se décrispa légèrement lorsque Myst lui dit qu'elle nétait pas offensée, mais il était toujours raide et immobilisé après le passage fugitif d'une main blanchâtre sur son visage. En y repensant, c'était son premier contact humain depuis... Quarante-quatre ans (sachant qu'il avait passé vingt-quatre ans dans le monde réel et une vingtaine dans hollow dream, tout concordait...). Le parfum agréable des lèvres de l'ancienne humaine parvenait aux narines de notre protagoniste. Il s'efforcat néanmoins de faire une belle réponse construite a la jeune ombre qui lui faisait face de très près, et qui le fixait avec insistance...

"Il faut bien que je subsite. Mais je me nourris de peur brusques et fugitives, pas de l'égo torturé de mes victimes. J'essaye de faire le... Moins de mal possible autour de moi... Cela me rend aussi très ...faible..."

Révéler ainsi son plus gros talon d'achille a une quasi-inconnue, quel manque total de bon sens! Mais Soren était bizarrement confiant, croyant dur comme du fer que la jeune Myst n'allait finalement pas le manger, et que dans un sens il n'avait pas a la traiter comme inconnue, elle qui semblait a la fois si eloignée et si proche de lui...

Voilà bien une révélation des plus surprenantes. Difficile à décrire l'impacte de ces paroles sur l'esprit étrange de Myst. Lentement, très lentement, elle inclina la tête sur le côté, sans cesser de fixer l'ancien bibliothécaire, mais étrangement, son regard semblait perdu quelque part. Une Ombre pouvait survivre une vingtaine d'année sans tuer? C'était une révélation fantastique, du moins pour Carmen, mais pas pour Myst. Un rapide combat intérieur la fit tressaillir, mais il s'acheva bien vite. Du côté son visage s'inclina vers l'avant, une de ses mains venant se poser contre sa propre tête rendue un court instant douloureuse. Vois, Myst, le mal n'est pas indispensable, il existe toujours un moyen de s'en sortir, non? Oh non, jamais. Jamais d'espoir, cela rend faible, ne le dit-il pas lui-même? Mais cela n'empêche pas de survivre, non? Si, cela peut mener à la mort. Où donc se situait la frontière à présent? Silence, vilaine Carmen! Ou j'étoufferais de mes mains ta petite voix... Et le calme se fit à nouveau. Adieu le mal de tête, la main quitta le front, les yeux se relevèrent, plus présents, mais toujours dans ce mélange de curiosité malsaine.

"Vous finirez par disparaître, alors... Eux n'auront pas de bonnes intentions face aux Ombres. Non, jamais."

Une petite hésitation, elle fit un pas en arrière, puis comme se ravisant, refit un pas en avant. Mitigée, Myst. Comment prendre une révélation qui pourtant était indigne d'une Ombre? Mais lui vivait pourtant bien avec... Mais il devait hélas pour lui être le seul. Imprudent, très imprudent. La chance seule expliquerait sa survie, ou alors aurait-il menti? Non, pas de mensonges. Qui se risquerait à proférer pareille monstruosité sans fondements? Etrange étrange, ce Soren.

"Pas de pitié, ils n'en auront pas. Pas de paix, ils nous en privent, nous narguent, imaginent leur supériorité illusoire. Mais ils ne sont que des proies et nous devons les traquer."

Oh oui, ils étaient énervants, ces humains. Toujours à croire, encore croire, espérer futilement qu'il existe un moyen de s'éveiller. Mais c'est faux, tellement faux! Tous finissent par périr. Qui souhaite attendre à jamais qu'un corps étendu se relève à nouveau? Qui serait prêt à subir les tourments d'un réveil? Certains ne doivent même pas savoir dans quel état est leur corps après des jours, des mois ou même des années sans mouvement. Pauvres humains ignorants!

"Alors, traquez-les, ou un jour ils vous tueront."

Malgré ses mots peu tendres, sa voix n'était en rien menaçante, ni même agressive. On aurait presque dit une demande, ou même une supplique.

Quel étrange jeu Myst jouait là. Hésitations, simulis de migraine, un pas en arrière, un pas en avant avec des changement de ton. A croire que l'annonce que lui avait fait Soren l'avait boulversée. Le fantôme pensa immédiatement a la shkizophrénie, il avait lu un bouquin la dessus : la cohabitation de plusieurs personnalitées dans le même corps, souvent en opposition constante avec soit-même. Que dire, que faire? La dernière réplique de la jeune femme éthérée frappa considérablement Soren : elle lui disait de se mettre a la chasse en le suppliant! Tenait-elle a lui au point de lui demander de se mettre a tuer pour survivre? Difficile a determiner...

"Je... Heu..."

Un simulis de réponse désordonné était sortit des lêvres de Soren, mais il ne savait que dire. Il avait toujours vécu en marge des autres ombres par son mode de vie ou ses "habitudes alimentaires". Mais les trois quart du temps, on le traitait de pédé, de lâche, de marginal ou de traître. Et voila que devant lui se trouvait une charmante jeune femme qui, en plus de chercher a se demander comment il pouvait survivre comme ça, lui demandait de tuer pour rester entier. Hésitant et tétanisé, la main du fantôme vint se poser sur l'épaule de son interlocutrice, dans un geste maladroit mais qui se voulait rassurant...

"C'est... Mon mode de vie... Je n'ai jamais voulu de mal a personne, et si quelqu'un veut ma mort, je le comprendrait... Les ombres sont en général plutôt comme vous et... Sachant que vous pouvez les tuer les humains ne feront pas de pitié. Je croit que si un humain me tue... Je ne lui en voudrait pas. Il aura pris les devant, et il... Aura surement eu raison..."

Long silence...

"Je ne blâme en rien vos modes de chasse ou de survie. Cela vous rend bien plus fort pour affronter les menaces de ce monde. Mais je ne suis attaché a rien ici. Je suis cliniquement mort et j'ai perdu l'espoir de me reveiller. Que m'importe ma propre mort si cela ne blesse personne..."

Finalement la demoiselle se décida pour un pas en arrière, quittant la main qui s'était pourtant si gentiment posée sur son épaule. A défaut d'une certaine neutralité, ses traits se teintèrent d'une profonde tristesse, donnant plutôt un aspect navrant à l'ensemble. Non, qui serait satisfait de se faire tuer par des aveugles? Surtout alors qu'il sait lui aussi, qu'il sait que c'est sans espoir. Alors pourquoi ne pas chercher à leur ouvrir les yeux à ces humains? Elle détourna son attention de Soren pour revenir balayer les arbres morts du regard, comme si elle cherchait quelque chose, un indice, ou une preuve quelconque. Pour quoi faire exactement? Elle n'en avait même pas la moindre idée. Dans sa tête, le conflit reprenait de plus belle et Myst n'aimait pas ça. Oh non, elle détestait quand l'autre demoiselle s'éveillait, quand elle voulait donner son avis, imposer sa volonté. Vilaine fille, ne voudra-t-elle donc jamais se taire?

"Pourquoi?"

Ses orbes entièrement noires revinrent se poser sur Soren, toujours en proie à une profonde tristesse semblait-il. Il avait fait son choix et il perdurait depuis une vingtaine d'années alors pourquoi n'arrivait-elle pas entièrement à accepter cet état de fait?

"Ils vous ont tués, ils vous tueront encore. Moi je ne les laisserait pas me tuer une troisième fois!"

Encore un pas en arrière, le tumulte dans sa esprit devenait insoutenable. Ses mains vinrent se plaquer contre ses tempes et elle secoua vivement la tête, envoyant danser en tout sens ses mèches blanches. Puis subitement, elle releva le visage, laissa retomber ses mains, c'était le calme à nouveau, et toute expression de tristesse avait purement et simplement disparu, comme si un simple courant d'air avait pu retracer les contours de son visage.

"Vous n'auriez pas dû devenir Ombre. C'est une erreur, une regrettable erreur. Pas assez de désespoir, pas assez de peur. Pas de place pour vous."

Puis elle fit un demi-tour un brin théâtrale, mais c'était dans son style, et, s'élevant sur la pointe des pieds, elle repris ses pas comme elle les avait commencés au moment de l'arrivée du bibliothécaire.

D'abord interloqué, Soren commençat a emettre un petit rire amusé, petit rire qui se transforma en ricanement cynique. Changeant brusquement de ton, le fantôme s'adressa a son interlocutrice d'une voix forte, avec une attitude oscillant entre colère, tristesse et indignation...

"Et vous, vous avez le profil d'un ombre? Selon vous seuls les meurtriers et les tortionaires peuvent avoir l'immense honneur de devenir des ombres? Selon vous je n'ais pas ma place ici? Et qui a sa place ici hein? Qui a pu être assez vil dans sa vie pour mériter ce que nous vivont tous? Les humain, graines d'espoir? Ou alors les créatures, chimères et ombres, qui on perdu cet espoir, et font tout pour entrainer ceux qui auraient la chance de s'échapper dans leur sillage? Vous pensez avoir votre place du coté des fantômes parce que vous tuez des humains?Vous vous sentez si supérieure alors que vous ne faites que répandre du sang? Personne n'a sa place ici... Je vous croyait différente des autres ombres, je pensait que vous ne trouviez ni plaisir ni satisfaction a ôter la vie. On dirait que je me suis trompé... De toutes façons le comportement humain n'a jamais éte mon fort..."

Pas de bégaiement, pas d'hésitation, on aurait pu croire que ce n'était pas Soren qui parlait. Mais les propos de Myst l'avaient profondément choqué. L'espace d'un instant il avait eu l'espoir, l'espoir stupide et malvenu qu'il n'était pas la seule ombre équilibrée de tout hollow dream. Comme si cela ne suffisait pas, l'ancien bibliothécaire vint se planter devant la jeune femme, bras ouverts...

"Vous voulez tant que ça mériter votre "place"? Vous voulez tant que ça me montrer que je suit une mauvaise ombre? Alors tuez moi. Cela devrait-être facile non? Vous qui chassez avec plaisir et non par dégoût! Montrez moi donc a quel point une tortionaire d'élite dans votre genre peut se révéler abjecte!"

Pour la première fois de sa vie, la colère de Soren avait prit le dessus sur son bon sens, sa raison et son sens de l'analyse. Il c'était suicidairement mis a la portée d'une femme qui pouvait le planter ou elle voulait avec ce qu'elle voulait. Mais c'est souvent lorsque l'on est déçu que se manifestent les plus grand accès de rage...

Un court instant la stupeur avait fait son apparition, mais bien vite l'impassibilité de l'Ombre avait refait surface. Quelle étrange provocation, une réaction si... Humaine. Non, il n'était pas à sa place, et sans doute Myst devrait-elle faire ce qu'il lui suggérait? Calmement elle leva une main, mais sur la fin, ce geste ne fut plus gracieux. Les doigts repliés, pareilles aux serres d'une quelconque charognard, elle la tendait vers la gorge de Soren.

"Facile... Si facile... Les humains, futiles. Les ombres faibles, comme les humains, ne sont que des proies. Mais Myst n'a encore jamais tué un semblable. Non non. Dois-je commencer?"

Derrière l'impassibilité, l'esprit malsain de Myst bouilonnait. Comment pouvait-il prétendre savoir ce qu'elle était? Oh, il n'avait pas tort. Abjecte, mauvaise, tous ces défauts elle les avait. Mais malgré cet état de fait, une certaine conscience de soi refaisait surface et blessait cruellement le pouvoir qu'elle avait pris sur elle-même. Comment avait-il osé? Oui, elle trouvait plaisir et satisfaction à torturer et tuer, tout comme quelqu'un d'autre avait trouvé la satisfaction en la détruisant. Ce n'était que justice après tout, non? Jamais elle ne pourrait se venger de sa tortionnaire, alors elle se vengeait sur tous les autres humains. Vicieuse? Bien évidemment, elle ne se l'était jamais caché. Alors pourquoi ça faisait mal tout à coup?

Sa main se rapprocha d'avantage de la gorge, ses ongles ne faisant pourtant qu'effleurer la peau. Puis ses doigts reculèrent de quelques centimètres... Myst baissa les yeux un court instant prenant alors seulement conscience que son bras tremblait. Pourquoi? Au fond d'elle, Carmen hurla, mais ce ne fut qu'un gémissement douloureux qui franchit les lèvres de l'Ombre. Elle fit un pas en arrière, son regard se relevant sur Soren. Un regard quelque peu voilé par... De l'humanité? Non non, Myst n'était pas humaine. Pourtant cette fois, elle peinait à chasser cette illusion de sa tête.

"Elle ne veut pas... Pourquoi? Les faibles doivent mourir comme les humains pourtant, non? Non... Oui ou non? Pourquoi lui donner des forces alors que j'essaie de la tuer Soren?"

*"Lui donner"... "La"... surement sa deuxième personalitée...*

Les ongles tranchants de Myst avait déja effleuré la carotide de Soren a deux reprises, mais la jeune ombre semblait pour le moment destabilisée. Pourquoi? Il arrive parfois que deux personalitées d'un skyzophrène entrent en conflit sur quelque chose, ce qui dans ce cas la semblait être le bibliothécaire lui même. Même si le coté pervers de celle qui lui faisait face voulait voir le sang de notre protagoniste couler sur le sol; son coté plus humain voulait l'épargner. Cruel dilemme pour la jeune femme...

"Vous voyez, si vous hésitez c'est que vous avez encore une part d'humanitée. Chaque victime que vous faites vous transforme un peu plus en bête sauvage, pas en quelque chose de mieux. Les humains son faibles, mais ils on l'espoir, a la fois leur plus grande force et leur plus grand tare. Je vous ai senti differente de nos confrères. Montrez moi que vous valez mieux qu'eux..."

Toujours les bras écartés, Soren avait parlé d'un ton assuré, assez doux, ce qui a la base ne lui ressemblait pas. Il se fichait de mourir mais il avait retrouvé une partie de son calme. Il savait qu'il ne pourrait surement pas "convertir" Myst, mais il voulait au moins essayer de la raisonner, elle qui lui paraissait si proche malgrès certains aspects de son comportement...

Oh non, il n'avait pas le droit. Pas le droit de la faire douter. Silence vilaine Carmen, la conscience peut aussi bien se faire écraser, aussi facilement que l'on écrase un insecte, aussi facilement que l'on arrache une gorge. Son bras ne tremblait plus lorqu'elle porta sa main sevant ses propre yeux, chassant ces pensées qui n'avaient pas le droit d'exister. Encore elle secoua la tête, doucement cette fois, en simple signe de dénégation. Silence, Carmen se faisait baillonner de nouveau.

"Chimères et humains sont des bêtes sauvages."

Sa main s'écarta et elle releva la tête. Toute trace d'humanité avait à nouveau disparu, comme chassé. Oui, elle avait fermé les jolies lèvres dérangeantes de sa conscience et maintenant... Maintenant? Un peu de sang? Peut-être... Mais ce n'était pas certain.

"Les Ombres sont des artistes, des génis de la souffrance. Et celles qui ne le sont pas... Tant pis pour elle."

A nouveau elle fit un pas en avant, mais sans lever de main menaçante. si elle le faisait, sa tête allait-elle encore lui faire mal? Oh non elle ne voulait pas, pas maintenant. Mais sa voix redevenue mielleuse prenait les teintes d'un murmure étonamment glacial.

"Un jour... Un jour je vous tuerai, Soren... Et je la tuerai avec vous. Il n'y aura plus personne pour essayer de m'arrêter et je serai enfin libre. Libre de dispenser comme bon me semble ces souffrances qui feront gémir mes proies à tel point que j'en éprouverai des frissons de délices."

Elle se rapprocha encore un peu, juste un peu, glaciale ombre cette fois. Son impassibilité sa curiosité, tout ce qui pouvait encore laisser un semblant d'espoir avait disparu pour ne plus laisser qu'une impression de vide, de mort complète.

"Mais ce jour, ce n'est pas celui-là. Moi seule décide quand je tue, quand j'épargne. Et personne, ni vous ni elle n'a le droit de s'y opposer."

Et malgré la menace évidente dans ses mots, sa voix était paradoxalement douce, un peu comme lorsque l'on raconte une histoire à un enfant. L'avertissement valait pour deux. Ainsi, elle dirigeait encore Carmen, et Carmen arrêtait de gémir puisqu'elle n'avait pas tué. Un bon compromis, mais le bibliothécaire restait un danger pour elle. Tout comme elle allait devenir dangereuse pour lui.

Rien a faire, le coté obscur de Myst domainait largement le coté clair qui venait de sauver la vie de Soren. Quelle froideur, quelle beautée glaciale, quelle... Psychopate. Rien a faire, le bibliothécaire restait desesperément la seule ombre non mentalement sinistré du village automnal. Mais il avait fait douter, et même, avait destabilisé une ombre uniquement avec la parole...

*D'un autre coté elle m'aurait massacré en combat singulier...*

La déclaration de guerre avait été faite. Un jour ou l'autre, le fantôme mourerait des mains de celle qui lui faisait actuellement face. Un jour peut-être, peut-être jamais, car il pouvait s'en passer des choses a Hollow dream... Soren remit calmement les mains le long de son corps et réajusta sa veste...

"Très bien, jeune artiste de la mort. Qui sait peut être que mon sang sur vos mains vous fera reflechir plus que vous ne l'avez fait aujourd'hui..."

La demoiselle balança mollement sa tête d'un côté et de l'autre, comme suivant une mélodie, la jolie mélodie du silence revenu. Il était méchant, le bibliothécaire, méchant pour elle. Mais tout est relatif, n'est-ce pas? Dommage, elle l'aimait bien pourtant. N'est-il pas sage et intelligent? Un peu trop pour Myst, sans doute. Un peu trop perturbateur du faux équilibre qu'elle s'était placé. Mais elle avait son temps, tout son temps peut-être pour profiter, et finalement un jour tuer. Mais elle n'y était pas encore non. Et comme pour les humains, elle allait pouvoir jouer. Juste un peu, puisqu'elle aimait jouer. Un sourire des plus charmant vint à nouveau changer ses traits, décidément elle devait être sérieusement instable. Pauvre créature! On pouvait aisément en venir à se demander qui de la danseuse ou du bibliothécaire était le plus faible. Lui probablement physiquement, elle mentalement.

"Réfléchir... Peut-être! Savoir quoi faire d'une si belle couleur que le rouge sang... Mais quelles qu'en soient les conséquences, le résultat sera le même pour vous."

Elle croisa ses mains, les releva devant ses lèvres et étouffa un petit rire insouciant, très très très loin de ces menaces qu'elle avait pourtant proférées. N'était-ce pas une part de soulagement pour l'esprit double que d'avoir retrouvé sa suprêmatie malsaine?

"Mais nous avons tout notre temps... Tellement de temps! Peut-être même jamais Myst ne fera de mal à Soren... Peut-être que quequ'un d'autre s'en sera occupé avant? Oh, ce serait dommage, je trouve."

Elle prit un air déçu, vraiment déçu, sincère peut-être, face à de pareilles pensées. Alors levant un indexe qu'elle brandit sous le nez de Soren, elle fronça les sourcils et prit un de ces airs si commun aux dames qui font la morales alors qu'elles ne doivent elles-même que peu la respecter.

"Alors il faut survivre, d'accord?"

Et malgré le côté leçon, cela pouvait prsque passé pour un ordre. Elle était décidément complétement à l'ouest, la pauvre fille. A demander le contraire de ce qu'elle compte faire.

Pauvre fille. C'est vraiment la première chose a laquelle on pensait après avoir découvert la facette obscure (et malheureusement dominante) de Myst. Une ombre perversement sadique, parfois entravée par son bon coté. Mais Soren sentait la confusion dans la tête de son interlocutrice. Il n'hésitat d'ailleur pas a en rajouter un coup, sachant que son esprit était au moins aussi aiguisé que les ongles de la jeune femme... C'est donc presque en minaudant que le bibliothécaire répondit, comme si il utilisait les propres armes de Myst pour faire peur a cette dernière...

"N'ayez crainte jeune fille, ma survie est déja assurée, car je n'ai pas beaucoup de prédateurs. Vous feriez mieux de vous soucier de vous, car, a choisir; un humain en colère ou une chimère rageuse prefèrera vous faire payer vos crimes plutôt que tuer un pacifiste... Restez en vie, cela serait dommage que vous ne puissiez honorer votre promesse..."

Soren passa la main dans ses longs cheuveux bruns. Ses yeux rouges n'avaient pas quitté le visage de celle qui lui faisait face. Il voulait ainsi semer la confusion dans les neurones de la jeune fille. Car il n'était pas dans ses habitudes de parler de la sorte, non non... Il attendait néamoins une réaction de la par de sa charmante consoeur...

La main de la demoiselle retombit mollement, ses traits se détendirent pour perdre tout aspect de sévérité. Difficile à dire sur l'instant quel masque elle avait adopté, la situation se renversait d'une manière quelque peu déplaisante pour Myst. Quelque chose en elle frémit, mais elle ne se contenta que de reculer d'un pas avant de se dandiner d'une jambe à l'autre, son regard fouillant à nouveau les horizons alors qu'il y avait pourtant rien à voir hormis cette éternelle forêt d'arbres morts.

"Hm... Elle voudrait bien mourir la vilaine fille, elle ne se bat que pour m'embêter."

Mais elle que voulait-elle? En fait, elle ne savait pas. Mourir, elle n'y avait jamais songé, pas plus que les raisons pour lesquelles on voudrait la tuer. Mais maintenant qu'elle y pensait, une part insoupçonnée de son mauvais côté apparaissait.

"Par l'humain ou par la chimère, peu importe. Je menace les deux, mourir de leur main ne serait que justice, non?"

Elle haussa les épaules, nonchalente. Apparamment la mort faisait partie de sa vie, si l'on pouvait appeler ça une vie. a moins qu'elle ne soit déjà morte? C'était ça aussi. La seule raison pour laquelle elle survivait c'était pour torturer les humains et servir le chef. La mort ne serait que la continuité de ce qui a fait d'elle ce qu'elle est, n'est-ce pas? Elle revint se fixer sur le bibliothécaire, affichant un sourire qui se voulait cynique mais dont l'effet était quelque peu brisé par le léger tremblement de ses lèvres.

"J'ai peur... Non, elle a peur de mourir, mais elle s'y est résolu, sinon je ne serais pas là. Et vous aussi vous vous y êtes résolu, puisque vous n'êtes plus humain. La seule chose qui reste, c'est... Que faire de ce qui nous reste à exister? Moi j'ai choisi, vous aussi. C'est différent, c'est tout. Reste à savoir qui est dans le vrai."

Myst ne se dadinait plus, mais malgré le calme apparant, la petite voix gémissait toujours et elle baissa le regard levant machinalement un main vers ses propres yeux, s'assurant peut-être que ce fichu trouble n'avait laisser aucune larme s'enfuir?

"Nous verrons, simplement. celui qui survivra à l'autre sur le temps aura eu raison."

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